Un juge a til le pouvoir de modiler les sanctiosn fiscales? (26/09/2007)

0d9f79fbf5093bfc8366e177f794eb5c.jpgLe juge, judiciaire ou administratif, a t-il un pouvoir de modulation des sanctions fiscales?

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Cette  question, extrêmement politique, au sens noble du terme, et à ce jour controversée, est celle de savoir si l'article 6, 1 de la convention européenne des droits de l'Homme qui énonce le droit à un procès équitable autorise, ou non, le juge de l'impôt à moduler le taux de la sanction prévue par la loi pour tenir compte de la gravité de la faute et de la personnalité du contribuable.

La cour européenne des droits de l’homme a donné des approches positives de solutions.

Le Conseil d'Etat et la Cour de cassation n'ont pas la même position à cet égard.

 La Haute Juridiction administrative écarte le pouvoir de modération du juge.

La Cour de cassation, pour sa part, reconnaît au juge le pouvoir de modération, quelle que soit la nature de la sanction.

Cette question, souvent méconnue des praticiens, pose le problème plus vaste  du contrôle des décisions des Administrations portant sanction par un juge.

Jurisprudence administrative

Pour le conseil d’Etat, le juge de l'impôt exerce un contrôle sur la qualification du comportement du contribuable retenue par l'administration mais il n'a pas le pouvoir de moduler le taux de la sanction prévue par la loi pour tenir compte de la gravité de la faute commise par l'intéressé.

Avis CE 5 avril 1996 n° 176611 sect., Houdmond : JO 2 mai 1996 p. 6635. 

Un nouvel avis a confirmé en 1998 la position antérieure du Conseil d'Etat.

 

Avis CE 8 juillet 1998 n° 195664 8e et 9e s.-s., Fatell  , JO 15 octobre 1998 p. 15619. BO 13 N-1-98 .

 Ainsi,une cour administrative d'appel ne méconnaît pas ces stipulations en jugeant qu'elle n'a pas à moduler le taux de la pénalité prévue par l'article 1763 A du CGI.

CE 24 mars 2006 n° 257330, 9e et 10e s.-s., SA Martell et Co

Le moyen tiré de ce que l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'Homme permet au juge de modérer le taux légal des pénalités fiscales n'est pas d'ordre public et le tribunal n'a pas le droit de sa saisir d'office

CE 5 octobre 1998 n° 170693, 8e et 9e s.-s., SARL Stainville Productions

Notre position :

La position de stricte fermeté prise , dans ce domaine, par la haute assemblée ne nous semble pas encore adaptée aux l'interprétations dominantes données par la jurisprudence internationale .Cette position revient en fait à attribuer à une administration  un pouvoir autonome de sanction sans véritable contrôle juridictionnel  et  sans possibilité d'un appel indépendant , ce que veut justement  éviter la convention européenne des droits de l'Homme.

Les contribuables qui savent qu’une jurisprudence évolue au fil du temps continuent  donc à juste titre à se protéger en soulevant ce moyen jusqu’au jour de la réforme de la jurisprudence  en saisissant soit la cour de Strasbourg.ou même la cour européenne de Luxembourg , en effet la convention européenne des droits  de l’homme a été intégré dans notre droit positif  et est  donc devenue d’application directe  par l’article 6 du   Traité de l’Union Européenne qui dispose:

« L’union respecte les droits fondamentaux tels qu’ils sont garantis par la convention européenne  de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales signée à Rome le 4 novembre 1950 et tels qu’ils résultent des traditions  constitutionnels communes aux Etats membres en tant que principe généraux du droit communautaire ».

Ce traité , de valeur supérieure à la loi interne,  s’impose à notre système judiciaire, et les contribuables ont donc maintenant la possibilité de demander  l'application de la convention de sauvegarde des droits de l'homme plus facilement en utilisant deux règles de procédure prévues par les traités européens

.  

LA QUESTION PREJUDICIELLE cliquer

L'ACTION EN MANQUEMENT cliquer

Jurisprudence judiciaire

La chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé à de nombreuse reprises que les juridictions judiciaires avaient le droit de moduler les sanctions fiscales .a jugé comme suit :

Pour la Cour et en vertu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, un système de majoration d'impôt ne se heurte pas à l'article 6 de la convention européenne des droits de l'Homme pour autant que le contribuable puisse saisir de toute décision ainsi prise à son encontre un tribunal offrant les garanties de ce texte.

Cass. com. 29 avril 1997 n° 95-20001, Ferreira :

Cass. com. 21 octobre 1997 n°96-10431, Marbotte : 

Cass. com. 20 octobre 1998 n° 96-20772 , Charnallet :  

 

Surtout, la Cour de Cassation a décidé que ni le recours gracieux pour obtenir la remise ou la modération des pénalités, ni le recours pour excès de pouvoir contre les décisions de la juridiction gracieuse ne constituent le recours de pleine juridiction permettant au tribunal de se prononcer sur le principe et le montant de l'amende au sens de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'Homme.

 Cass. com. 17 novembre 1998 n° 96-21749 ,Mr C. Dupuis :

Le tribunal, devant qui le contribuable invoque le fait qu'il a acquitté la taxe (défaut de vignette auto : CGI art. 1840 N quater) immédiatement après avoir été verbalisé, a le droit d'apprécier la proportionnalité de la sanction au comportement du contribuable.

Cass. com. 15 juin 1999 n° 98-10931 ,M. Lise :      BO 13 N-1-99.

Le juge ne peut se prononcer sur l'application de la pénalité prévue à l'article 1840 N septies du CGI (défaut de déclaration pour le paiement de la taxe annuelle sur les véhicules de sociétés) sans rechercher si l'amende ainsi infligée est proportionnée au comportement du redevable.

Cass. com. 13 décembre 2005 n° 03-13984 : Société X. Frères

Dès lors que les majorations pour défaut de déclaration prévues par l'article 1728, 3 du CGI présentent le caractère d'une punition, le juge est fondé à se prononcer sur le principe de leur application et sur leur montant. Il découle en effet des dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'Homme (droit à un procès équitable) qu'un recours de pleine juridiction permettant au tribunal de se prononcer sur le principe et le montant de la sanction doit être accordé au contribuable.

 Cass. com. 22 février 2000 n° 97-17822 , Ferrière     BO 13 N-7-00.

Cass. com. 27 juin 2000 n° 97-22351, Bodin :   BO 13 N-7-00 ;

La cour d'appel d'Aix en Provence qui  s'était  prononcée sur le principe et la proportionnalité au comportement du contribuable de la majoration pour défaut ou retard de déclaration appliquée par l'administration en relevant que, malgré deux mises en demeure de l'administration fiscale, l'intéressé avait refusé de procéder à la déclaration à laquelle il était assujetti et en retenant qu'aucune considération générale ou d'espèce ne justifiait la réduction sollicitée a été confirmée

Cass. com. 3 octobre 2006 n° 05-11438, Mme X

 

ATTENTION

A)              Si la Cour de cassation reconnaît au juge judiciaire le pouvoir de modérer les pénalités, celui-ci ne peut se prononcer sur le montant de la sanction que s'il est expressément saisi d'une contestation sur ce point .

Cass. com. 14 décembre 1999 n° 97-17308 , Abella

Le juge n'est, en effet, pas tenu d'exercer d'office son contrôle sur la pénalité.

 

B)le requérant doit fournir aux juges du fond les éléments d'appréciation pertinents sur lesquels il se fonde pour demander la décharge ou la modération des pénalités

 

Cass. com. 22 février 2000 n° 97-17945 , Société centrale immobilière 71, rue Albert : BO 13 N-7-00 ; 

Cass. com. 1er juillet 2003 n° 00-13966, DGI c/ X:). 

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