Abus de droit et charge de la preuve (10/11/2008)

charge de la preuve.jpgNouveau : L’administration doit toujours apporter la preuve du but exclusif de l'objectif fiscal

 

CAA PARIS  3 octobre 2008 N° 06PA02147  Aff DEFI GROUP

 

 

 

"la circonstance que les frais généraux n’aient été réduits que de façon très minime par l’opération concernée ne suffit pas à établir que tel n’était pas le but recherché par la société ; que dès lors, l’administration ne peut être regardée comme établissant que la société DEFI GROUP a eu recours à un montage juridique dans le but exclusif d’éluder ou d’atténuer ses charges fiscales ; que par suite, elle ne démontre pas l’existence d’un abus de droit" 

 

 

TROIS ARRETS EN FAVEUR DU CONTRIBUABLE

 

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Le conseil a rejeté la position de l’administration dans ces trois affaires car cette dernière  n’apportait  pas la preuve, dont la charge lui incombait  en l’espèce, dès lors que le comité consultatif pour la répression des abus de droit n’avait  pas été saisi, que les opérations contestées n’avaient  pu être inspirées par aucun motif autre que celui d’éluder ou d’atténuer l’impôt .

A titre de rappel, le conseil avait utilisé une argumentation similaire en matière de fiscalité internationale pour refuser de voir appliquer l’article 57 car
le service n’établissait pas, en se bornant à se référer…." 

 

  Conseil d’État du 20 juillet 2007 289641 Aff EURL Elysées George V 

A la suite d’une vérification de comptabilité de l’EURL Elysées George V, l’administration fiscale a remis en cause l’application de l’exonération (prévue à l’article 44 quater du code général des impôts, alors en vigueur, aux bénéfices réalisés par cette entreprise, dont Mme A était l’unique associée, au titre des années 1987 à 1989, au motif que sa création avait constitué un abus de droit ;
Mme A était à la fois gérante et associée à hauteur de 90 % des parts des sociétés civiles immobilières Elisopy et Bimbois ;
Une promesse de vente portant sur un immeuble sis 15, rue Arsène Houssaye à Paris 8ème a été consentie à la première de ces sociétés le 31 octobre 1986,
cette promesse a cédée le jour même gratuitement à l’EURL Elysées George V, alors en cours de constitution ;
l’EURL, après avoir acquis cet immeuble le 14 janvier 1987, l’a revendu le 28 août suivant en réalisant un profit de 836 000 F ; 
 par ailleurs, par acte du 22 décembre 1987, l’EURL a racheté à la seconde de ces SCI un immeuble sis 4, rue Marbeuf à Paris 8ème,
elle a revendu le 3 juin 1988, après travaux et éviction du locataire, en réalisant un profit de 3 700 000 F ;

l’administration fiscale, pour remettre en cause, l’exonération d’impôt sur le revenu dont Mme A a bénéficié en sa qualité d’associée de l’EURL Elysées George V, a fait valoir que ces circonstances démontraient que la création de cette société n’avait eu de but autre que fiscal et, par suite, était constitutive d’un abus de droit ;

Le conseil a rejeté la position de l’administration car cette dernière  n’apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe en l’espèce, dès lors que le comité consultatif pour la répression des abus de droit n’a pas été saisi, que la création de cette société n’a pu être inspirée par aucun motif autre que celui d’éluder ou d’atténuer l’impôt ;

II Conseil d’État 28 février 2007 n° 284565 Aff SA PECO

Des particuliers ont cédé à une  société  civile particulière de gestion les actions de la société PECO .
La SA PECO était une SPI  et les gains nets réalisés à l’occasion des susdites cessions d’actions sont entrés dans les prévisions de l’article 150 A bis du code général des impôts, en vertu duquel, relevant exclusivement du régime d’imposition des plus-values de cessions de biens immeubles, ils se trouvaient, eu égard à la durée de détention des titres et par application des dispositions alors en vigueur de l’article 150 M du même code, exonérés de l’impôt sur le revenu  à l’époque des faits .

Par ailleurs , SA PECO a réduit son capital par rachat d’actions moyennant l’attribution d’immeubles et de droits immobiliers, issus de son actif, à la société civile particulière sa société mère

L’administration a estimé que les associés de la SA PECO n’avaient, préalablement à l’opération de cette réduction du capital de la S.A. Peco , cédé leurs titres à la société civile particulière P.L.C. qu’en vue d’échapper à l’imposition qu’en application des dispositions de l’article 161 du code général des impôts chacun d’eux eût dû supporter à raison du boni recueilli d’un rachat direct de ses actions par la S.A. Peco ;

Et elle a considéré la cession  de SA PECO à la SCP comme, de ce fait, constitutives d’un abus de droit, et se prévalant des dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, l’administration a, par voie de redressement, rapporté aux bases de l’impôt sur le revenu dû par chacun des intéressés au titre de l’année 1982, au cours de laquelle était, selon elle, intervenu le rachat des actions par la S.A. Peco , le montant d’un boni déterminé suivant les modalités fixées par l’article 161 du code général des impôts

Le conseil, confirmant l’arrêt attaqué, a annulé la position de l’administration car cette dernière n’apporte pas la preuve, qui lui incombe dès lors qu’elle s’est abstenue de prendre l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit, que la cession par Mme A des actions de la S.A. Peco à la société civile particulière P.L.C. avant qu’elles ne soient rachetées par leur émetteur, présentait un caractère artificiel et ne pouvait ainsi être motivée que par la volonté d’éluder l’impôt ;

III Conseil d’État 10 juillet 2007 n°294537 Aff SARL TODD 

M. détenait, au moment des faits, plus de 99 % du capital de la SA Todd freinage ; que la SARL Todd a été créée par M. le 20 mars 1995 dans le but de procéder à la fusion de la SA Todd freinage et de sa filiale, la SARL Newco ;
Cette fusion a été approuvée au cours des assemblées générales des sociétés concernées le 30 septembre 1995, avec effet rétroactif au 1er avril 1995 ; 
 Le 25 juillet 1995, M. a cédé 330 des 2 981 actions sur 3 000 qu’il détenait dans la SA Todd freinage à la SARL Todd , pour un prix de 4 950 000 F ;

L’administration a regardé cette opération de cession comme constitutive d’un abus de droit au motif qu’elle aurait eu pour but exclusif de permettre à l’intéressé d’échapper, grâce à l’application de la taxation proportionnelle définie à l’article 160 du code général des impôts, à la progressivité de l’impôt sur le revenu auquel il aurait été assujetti, en l’absence de la cession anticipée de ces titres à l’occasion de cette opération de fusion ;

Toutefois,il ressort des dispositions légales qu’en cas d’échange de droits sociaux résultant d’une opération de fusion et accompagné du versement d’une soulte, cette soulte est taxée exclusivement et immédiatement à l’impôt sur le revenu selon une taxation proportionnelle au taux de 16 % ; la circonstance que, comme en l’espèce, cette soulte représenterait une part supérieure à 10 % de la valeur nominale des titres reçus, n’a pour seul effet que de faire obstacle à l’application du bénéfice du report d’imposition de la plus-value calculée hors soulte et ne saurait rendre ainsi cette dernière imposable au titre des revenus de capitaux mobiliers ;

Position du Conseil

 a)l’opération par laquelle M. avait cédé, de manière anticipée, avant la date de la fusion-absorption, des titres de la société Todd freinage qu’il détenait à la SARL Todd , n’avait pas fait perdre à la somme qu’il avait reçue pour cette cession, son caractère de plus-value, sans qu’y fasse obstacle la circonstance qu’elle aurait excédée le seuil de 10 pour 100 des apports, la cour a pu, sans commettre d’erreur de qualification juridique, en déduire que M. et Mme n’avaient pas commis d’abus de droit ;

b)C’est sans dénaturer les écritures de l’administration, qui tendaient seulement à souligner que la soulte, si elle avait été perçue lors de la cession des titres, aurait été légèrement supérieure au seuil autorisé par l’article 371 de la loi du 24 juillet 1966, aujourd’hui codifié à l’article L. 231-6 du code de commerce, que  la cour a pu juger que l’administration ne critiquait pas utilement la possibilité pour le contribuable d’obtenir le versement d’une soulte taxable selon le régime des plus-values et non selon celui des revenus de capitaux mobiliers ;

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