Donation cession : la CAA de Lyon soutient une pratique de la place (26/12/2014)

 

tintin1.jpgNous savons tous que des transmissions à titre gratuit –succession ou donation- ont le mérite de purger les plus values potentielles existantes au moment de la transmission 

Les tribunes sur la fiscalité du démembrement

La pratique conseille donc de procéder à des donations, purgeant le plus value fiscale et de procéder ensuite à des cessions à la valeur de la donation c'est-à-dire ne dégageant aucune plus value imposable

Le fisc  rejette ce type d’opération en soutenant qu’il s’agit d’un montage fictif relevant de la procédure de l’abus de droit fiscal 

La CAA de Lyon vient  de confirmer cette pratique dans une situation délicate certes mais dans la quelle la dépossession des nu propriétaires était en fait inexistante

Mais que ve donc décider le conseil d’état? 

Dans un arrêt en date du 16 décembre 2014 relatif à une donation-cession, la CAA de Lyon rejette l'argument selon lequel la donation serait fictive aux motifs,

- d'une part, que "la circonstance qu'un acte de disposition soit assorti d'une clause d'inaliénabilité durant la vie du donateur ne lui ôte pas son caractère de donation au sens des dispositions de l'article 894 du code civil", et,

 - d'autre part, "que l'octroi au donateur usufruitier de pouvoirs étendus de gestion et de décision au sein de la société civile Guisanga n'altére pas l'obligation de restitution en fin d'usufruit en vertu de l'article 578 du code civil et n'est pas de nature, par lui-même, à remettre en cause le constat de son dépouillement immédiat et irrévocable dès la signature des actes de donation" 

C.A.A. DE LYON, 2ème ch 16/12/2014, 13LY02119, Inédit au recueil Lebon 

Mme Dominique BOUISSAC, rapporteur   M. LEVY BEN CHETON, rapporteur public

M.A  a, par acte notarié du 15 janvier 2003, enregistré le 28 janvier 2003, fait donation à ses trois enfants de la nue-propriété de 4 599 de ces actions ; son épouse a fait de même pour 400 parts lui appartenant  le 17 janvier 2003, l'ensemble des titres initialement détenus par M. et Mme A...ont fait l'objet, selon les termes d'un protocole d'accord négocié et arrêté le 25 octobre 2002, d'une cession en pleine propriété à la société SICAE VS 

 

à l'issue de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle dont M. et Mme A...ont fait l'objet au titre de l'année 2003, l'administration fiscale a écarté les actes de donation-partage du 15 janvier 2003 et imposé la plus-value de cession des titres de la société Tellif sur le fondement de la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

 

la position de l’administration

 

7. pour écarter l'acte de donation du 15 janvier 2003 par lequel M. A... a fait donation à ses trois enfants de la nue-propriété de 4 599 actions de la société Tellif, l'administration a relevé le délai très bref entre la donation-partage du 15 janvier 2003 et la cession des titres intervenue le 17 janvier suivant, puis la constitution, neuf jours plus tard, de la société civile Guisanga ; elle a également relevé que l'acte de donation-partage interdit aux donataires, sous peine de révocation de la donation, de céder, échanger, aliéner ou nantir les biens transmis durant la vie des donateurs, hormis à la société SICAE VS, qu'il comporte une clause intitulée " condition particulière " précisant qu'il était convenu entre le donateur et les donataires copartageants " qu'en cas de vente concomitante des droits démembrés sur les titres donnés, le démembrement se reportera sur le prix de vente. Ledit prix de vente devra en outre être réemployé en l'acquisition de titres eux-mêmes démembrés à concurrence d'un montant de 2 517 960 euros. Sur le surplus, soit la somme de 2 265 000 euros, l'usufruit du donateur s'exercera sous forme de quasi-usufruit dans les conditions stipulées au paragraphe intitulé convention de quasi-usufruit ", que la convention de quasi-usufruit insérée à l'acte de donation-partage prévoit que " le donateur n'est pas tenu de conserver en nature les valeurs mobilières présentement données, ci-dessus désignées et estimées, mais seulement à concurrence de 2 265 000 euros. Il pourra au contraire en disposer dans les conditions prévues par l'article 587 du code civil, c'est-à-dire comme un propriétaire sans avoir à en demander l'autorisation aux donataires, mais à charge de restitution en fin d'usufruit selon les modalités ci-après définies " ;

enfin, le service a relevé que les donataires avaient expressément dispensé le donateur de fournir une sûreté pour garantir la créance de restitution découlant de ce quasi-usufruit et qu'en sa qualité de gérant de la société civile Guisanga, M. A...disposait des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société et que les résultats bénéficiaires de la société ont été affectés intégralement au compte-courant de ce dernier ;

 

Position de la CAA

 

8. toutefois, ni le délai très bref qui s'est écoulé entre l'acte de donation-partage et la cession des parts détenues par M. A...et ses enfants dans le capital de la société Tellif, ni les restrictions apportées à l'exercice du droit de propriété des donataires, résultant notamment de l'interdiction d'aliéner ou de nantir les titres donnés pendant la vie des donateurs, sous peine de révocation de la donation, ni l'obligation de réemployer le prix de vente desdits titres à hauteur de 2 517 960 euros en l'acquisition de titres aux fins de créer entre M. A... et ses enfants une société civile de gestion patrimoniale et dont les statuts octroyaient à M.A..., donateur gérant, des pouvoirs étendus de décision, notamment pour la distribution des bénéfices, ne sauraient, à eux seuls, suffire à faire regarder la donation intervenue comme purement fictive dès lors, d'une part, que la circonstance qu'un acte de disposition soit assorti d'une clause d'inaliénabilité durant la vie du donateur ne lui ôte pas son caractère de donation au sens des dispositions de l'article 894 du code civil, d'autre part, que l'octroi au donateur usufruitier de pouvoirs étendus de gestion et de décision au sein de la société civile Guisanga n'altère pas l'obligation de restitution en fin d'usufruit en vertu de l'article 578 du code civil et n'est pas de nature, par lui-même, à remettre en cause le constat de son dépouillement immédiat et irrévocable dès la signature des actes de donation ; 
9. le caractère fictif de la donation-partage effectuée le 15 janvier 2003 n'étant pas établi, l'administration fiscale n'était pas fondée à mettre en oeuvre la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales pour écarter l'acte de donation-partage du 15 janvier 2003 afin d'imposer la plus-value qu'aurait réalisée M. A...lors de la cession de ses actions de la société Tellif s'il n'en avait pas donné la nue-propriété à ses enfants 

 

 

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