Trafin et la lutte contre la fraude fiscale (05/08/2011)

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La montée en puissance de TRAFIN en  2010

 

Le rapport 2010 du service de renseignement financier TRAFIN

 

les tribunes EFI sur TRACFIN 

 

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Les échanges avec l’administration fiscale 

 

Source le rapport Tracfin 2010 publié le 1er aout 2011

 

Tracfin échange des informations avec l’administration fiscale dans le cadre de sa mission de lutte contre les flux financiers illicites.

Afin d’assurer au mieux cette mission, le service a mis en place en son sein un pôle fiscal dédié. Les informations traitées par ce pôle sont non seulement celles présentant une prédominance fiscale, mais sont, plus largement, celles concernant les flux financiers susceptibles d’intéresser les finances publiques. Elles font l’objet du même processus d’enrichissement que toutes les autres informations exploitées par le service.

L’analyse des déclarations de soupçon reçues entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010, faisant apparaître un comportement lié à ce qui peut caractériser une fraude fiscale, révèle que 2 827 déclarations faisant mention expressément de cette infraction ont été envoyées, soit une moyenne mensuelle supérieure à 235 dossiers.

 

Le secteur bancaire est principalement à l’origine de ces déclarations (87 %) suivi par les compagnies d’assurance.

Parmi les professions non financières on notera la participation des notaires, des experts-comptables, des sociétés d’investissement et des conseils en investissement financier.

 

En 2010, aucun avocat n’a déposé une déclaration de soupçon et ce en application de la politique du Barreau de France :

 

« Dissuader pour ne pas déclarer »

 

Dans ce cadre, les avocats DOIVENT refuser de rentrer « en relation d’affaires » au sens  du GAFI en cas de transactions tracfinables.

 

la définition du GAFI sur "l'entrée  en relation d'affaires"

 

le tableau complet des déclarations de soupçon 

 

 

Analyse détaillée des déclarations
de soupçons à tracfin

2008

2009

2009

Nombre total des déclarations

14.565

17.310

19.208

Notaires

347

370

674

Commissaires aux comptes

5

22

46

Experts-comptables

19

55

98

avocats

3

2

0

 

 

Au terme des investigations diligentées par le service, des notes d’informations sont, le cas échéant, rédigées à destination de l’administration fiscale ou des autres services habilités à recevoir des informations lorsque les opérations concernées portent sur des schémas particulièrement frauduleux en termes d’enjeux financiers ou de complexité.

En 2010, 110 notes, concernant des personnes physiques ou des personnes morales, ont été adressées à la direction générale des Finances publiques (DGFiP). 

 

 

Les typologies relatives à des fraudes fiscales complexes
qui ont mobilisé Tracfin en 2010.

 

 

L’élargissement du champ d’intervention du service dans les conditions prévues par l’ordonnance du 30 janvier 2009 et le décret n° 2009-874 du 16 juillet 2009 s’est traduit par un accroissement progressif des déclarations liées à un soupçon de fraude fiscale.

 

 Sur les 19 208 signalements envoyés par les professionnels 2010, Tracfin a été destinataire de 2 827 déclarations émises au titre de l’article L.561- 15 II du Code monétaire et financier, c’est-à dire provenant de la fraude fiscale, soit environ 15 % du total des déclarations reçues en 2010.

 

Au regard des signalements reçus par Tracfin, la notion de fraude fiscale est souvent décrite en liaison avec d’autres infractions présumées. Ceci est particulièrement vrai pour les déclarations de soupçon qui visent des entreprises dans lesquelles la fraude fiscale peut se combiner avec du travail dissimulé ou de l’abus de bien social.

 

 Les secteurs les plus souvent concernés sont le bâtiment et les travaux publics (BTP), le commerce et l’immobilier.

 

En ce qui concerne les typologies à signaler, il convient de distinguer deux catégories.

 

• Pour les personnes physiques, il s’agit principalement

:

• Pour les personnes morales, on relève souvent le recours : 

L’augmentation du nombre de ces déclarations a permis au service d’enrichir ses typologies en matière fiscale. Les cas typologiques décrits ci  dessous illustrent des mécanismes significatifs et complexes de fraude fiscale qui mobilisent des trusts et des sociétés-écrans.

Pour les sociétés enregistrées à l’étranger, la recherche du bénéficiaire effectif est souvent difficile à appréhender. Les déclarants doivent donc collecter le maximum d’informations susceptibles d’aider le service à les identifier

 

Cas type:

 le rôle des structures écrans dans la dissimulation du bénéficiaire effectif.

 

Le cas suivant met en avant un système d’empilage qui consiste à effectuer des montages afin de dissimuler le bénéficiaire effectif des transactions.

 

Profil des intervenants

– Personnes physiques :

- Les personnes physiques sont majoritairement des représentants de personnes morales (gérants de sociétés) qui recourent à des trusts ou d’autres structures équivalentes afin d’opacifier l’information.

– Personnes morales :

- Deux sociétés établies en France se portent chacune acquéreur de biens immobiliers situés respectivement en Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur pour des montants estimés entre un million et cinq millions d’euros.

- L’activité déclarée par ces sociétés au registre du commerce est la gestion locative.

En outre, l’associé majoritaire des deux sociétés est une société anonyme X localisée dans un pays proche. Ces acquisitions sont financées par un prêt hypothécaire accordé par un trust basé dans un pays d’Asie. À ce stade, les bénéficiaires effectifs de ces acquisitions immobilières restent inconnus. Flux à l’origine du soupçon d’infractions

Le schéma décrit dans la déclaration reçue par le service indique que deux SARL, la société A et la société B, basées en France, ont acquis des biens immobiliers représentant des investissements significatifs. La société X est par ailleurs identifiée comme un associé majoritaire des deux sociétés françaises

 

Phase 1 : le bénéficiaire effectif est inconnu   cliquer

 

 

Phase 2 : Identification du bénéficiaire effectif par Tracfin cliquer  

 

 

 Les investigations menées par Tracfin vont révéler que le trust (Trust 1) basé dans un pays d’Asie, prêteur des fonds, intervient en tant que représentant (trustee) pour le compte d’un autre trust (Trust 2) localisé dans le même pays. Parmi les actifs possédés par ce second trust, figurent des parts de la société X identifiée dès l’origine comme l’associée majoritaire des deux sociétés françaises. Par ailleurs, les bénéficiaires effectifs du Trust 2, et par extension de la société X ainsi que des biens immobiliers acquis en France, sont des personnes physiques domiciliées à l’étranger, membres d’une même famille.

Le montage décrit ci-dessous fait obstacle à la connaissance des bénéficiaires effectifs dans le cadre d’achats immobiliers. Il vise manifestement à se soustraire ou à minorer certaines impositions dues en France du fait de la propriété d’un bien immobilier. En effet, d’un point de vue fiscal, deux problématiques se posent : d’une part la déclaration à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) des immeubles détenus en France par des personnes non résidentes, et d’autre part l’assujettissement éventuel de ces biens à la taxe de 3 % due par certaines structures juridiques qui possèdent des immeubles en France.

Critères d’alerte :

– difficulté d’identification du bénéficiaire effectif dans le cadre d’une acquisition immobilière ;

– origine des fonds finançant une acquisition immobilière.


Cas type:

 la dissimulation d’une activité réellement réalisée en France.

 

cliquer pour voir le shéma

 

 

L’utilisation d’une structure localisée à l’étranger peut permettre de masquer le volume d’activité réellement exercé en France par un professionnel.

Profil des personnes

Personne physique :

– M. X exerce la profession de conseil en informatique ;

– il prétend également travailler comme consultant pour le compte de la société A qui possède un compte bancaire en France ;

– il est désigné mandataire du compte bancaire de la société A qu’il utilise très régulièrement.

Personnes morales :

– la société A basée dans un pays X ;

– la société B basée dans un pays Y ;

– la société C est cliente de M. X.

 

Flux à l’origine du soupçon d’infractions

 

Le compte enregistre des crédits correspondants aux prestations de conseil effectuées en France et des débits conséquents : dépenses par cartes bancaires, retraits d’espèces et virements vers d’autres structures, dont une société B basée dans un pays Y. Les recherches effectuées par Tracfin font apparaître les éléments suivants :

 

– la société A, bien que basée dans un pays X, est en réalité immatriculée dans un pays à fiscalité privilégiée. Son dirigeant statutaire est M X. La société ne déclare ainsi aucune activité en France et est présente dans ce pays en tant que « bureau de représentation » ;

 

– M. X travaillerait également pour le compte de la société B, basée dans un pays Y. La société B reçoit des virements conséquents provenant du compte bancaire de la société A. La société B semble prendre le relais en fin de période de la société A. En effet, le compte en France de la société A est clos peu après la réalisation des transferts de capitaux vers la société B ; – la situation fiscale personnelle de M. X n’est pas en rapport avec les sommes inscrites sur le compte bancaire ouvert en France au nom de la société A et sur lequel M. X est unique mandataire.

Les éléments factuels permettent de conclure que M. X a une activité de consultant informatique réalisée en France pour le compte d’un client français, la société C. Cette activité n’est, à aucun moment, déclarée en France, ni au titre de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), ni au titre de produit imposable à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, alors que les conditions d’exploitation de l’activité de la société A en France s’apparentent à celles d’un établissement stable et que les prestations informatiques rendues apparaissent comme taxables en France.

Toutes les opérations sont menées par M. X qui gère les flux bancaires et se comporte comme un dirigeant plutôt que comme un employé. Il est, par ailleurs, présent dans les statuts de la société A. Ce schéma de facturation, via des structures basées à l’étranger qui semblent se relayer dans le temps, paraît avoir pour objet de minimiser ou de dissimuler une activité imposable en France.

 

 

Patrick Michaud,avocat fiscaliste

 

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